«Tétraméron»
 José Carlos Somoza
Actes Sud, 2015



Le coffre aux histoires

Il y a eu le «Décaméron» de Boccace au XIVe siècle, et «L'Heptaméron» de Marguerite de Navarre au XVIe. Tous deux sont des recueils de nouvelles, mettant en scène dix personnages qui se racontent des histoires.
En 2012, l’écrivain d’origine cubaine Joseph Carlos Somoza reprend le principe pour son «Tétraméron», nom d’une société secrète de quatre mystérieux conteurs réunis dans la cave d’un monastère. Au cours d’une sortie scolaire dans ce même monastère, Soledad, douze ans, quitte son groupe et fait irruption dans la cave. Impossible de ressortir, il lui faut écouter les histoires de ces quatre inquiétants narrateurs.
Roman et recueil de contes, le «Tétraméron» est construit comme une poupée russe littéraire, ordonnée autour d’une mise en abîme audacieuse. Les histoires sont des coffres que le lecteur ouvre avec Soledad, chacun contenant le suivant. Il y est question de désir et de transgression, de science, d’art, de religion, de mythologie, de philosophie, de quête de soi et de la nature du Mal.
Nettement plus énigmatique que les autres romans de Somoza, «Tétraméron» enchante l’amateur de symboles et de mystères mais frustre celui qui cherche la solution, car il n’y en a pas. Le jeu des correspondances est infini, l’auteur avait prévenu dès les premières pages. Le lecteur est comme Soledad : «Elle ne reviendra jamais de cette excursion, mais bien sûr, elle ne le sait pas encore».


J-B.D.

article paru dans Le Républicain Lorrain le 8 mars 2015