«Moxyland»
Lauren Beukes
Presses de la Cité 2014

Techno-dictature

Le Cap, Afrique du Sud, dans un futur proche. Si l’apartheid selon des critères raciaux s’est estompé, une nouvelle forme de ségrégation sociale a vu le jour. Chaque citoyen ne peut compter que sur son téléphone portable et à sa carte SIM. Tout y est enregistré : informations personnelles, compte en banque, casier judiciaire et appartenance à une classe sociale. Les malheureux qui sont déconnectés ne peuvent plus rien acheter, ni se loger, se soigner, ni même circuler dans la ville. Chaque téléphone est aussi doté d’une fonction taser qui permet à la police de paralyser un suspect à distance.

Le gouvernement, la police et les corporations peuvent ainsi contrôler le peuple avec une terrifiante efficacité, et la plupart des citoyens se soumettent à cette dictature numérique. Il existe cependant quelques failles au système, que quatre personnages de «Moxyland», premier roman de la sud-africaine Lauren Beukes, tentent d’exploiter. Kendra la photographe, Lerato la corporate, Tendeka l’idéaliste révolté et Toby l’accro aux médias, jouent chacun à leur façon avec les limites du carcan de cette société dystopique, et vont payer très cher leur insoumission.

«Moxyland» est un roman d’inspiration cyberpunk qui met en scène les dérives possibles d’une technologie investie par les désirs totalitaires des gouvernements et des grands groupes commerciaux, et l’aspiration légitime à la liberté que provoquent ces abus. Le sujet n’est pas nouveau et ce premier roman souffre de quelques défauts, mais on est déjà séduit par l’imagination et la langue énergique de Lauren Beukes qui ont fait le succès de ses productions suivantes, «Zoo City» et «Les Lumineuses», déjà parus aux Presses de la Cité. 


J-B.D.

article paru dans Le Républicain Lorrain le 13 avril 2014